De emplois sociaux bons pour l'environnement

Dernière modification le 31/08/2016 - 15:32
De emplois sociaux bons pour l'environnement

«Ecologistic n’est pas un atelier protégé. Nous donnons un vrai travail rémunéré à nos collaborateurs.» Denis Schmitt, responsable des multiples ateliers des Etablissements publics pour l’intégration (EPI), tient à faire la distinction. Les collaborateurs en question ont beau être des personnes handicapées ou en difficulté d’insertion professionnelle, ils n’en fournissent pas moins un travail lucratif. En plus, c’est bon pour l’environnement.

Ces ateliers situés à la Praille se sont spécialisés dans le recyclage de matériel électronique, ainsi que dans la récupération des cartouches d’encre usagées pour imprimantes. Celles-ci sont collectées dans près de mille entreprises et collectivités genevoises et vaudoises, puis triées par marque et par modèle avant d’être vendues à des spécialistes qui les reconditionnent pour les remplir d’encre et les commercialiser. En 2015, 60 000 cartouches ont ainsi pu être remises dans le circuit.

Quant aux vieux ordinateurs, écrans, téléphones et autres lecteurs de DVD, on les démantèle pièce par pièce afin de séparer toutes les matières premières et de les revendre à des entreprises de recyclage. Pour certains appareils, le taux de fragmentation dépasse 90% et seuls 10% sont des matériaux composites qui doivent être incinérés.

L’efficacité du fait main

«Nous ne démolissons pas, nous déconstruisons, précise Aris Saliji, responsable d’atelier. Il faut faire cela proprement pour pouvoir en récupérer le maximum.»

Plastique, cuivre, câbles, fonte d’aluminium, tubes cathodiques, circuits imprimés, piles, etc.: les matériaux sont triés en vingt catégories différentes. Certaines ont beaucoup de valeur, comme le cuivre ou les circuits imprimés, qui contiennent des contacts en or. D’autres sont des déchets spéciaux qui doivent être dépollués ailleurs, comme les batteries ou les condensateurs. En tout, 350 tonnes de matériaux sont traitées ici chaque année.

«Nous occupons une niche au niveau local parce que les grosses entreprises de recyclage n’ont pas la main-d’œuvre pour faire ce travail, affirme Frédéric Métral, responsable d’Ecologistic. Le tri fait à la main est plus efficace. Nous obtenons par exemple un cuivre d’un très haut niveau de pureté. Le tri mécanique n’est pas aussi fin.»

Rien à voir avec des travaux d’occupation, donc. Ecologistic fait du social, certes, mais en restant compétitif. «J’aime croire que nos centaines de clients, autant des PME que des collectivités, n’ont pas recours à nos services seulement parce que nous assurons une prestation sociale, mais aussi parce nous proposons des produits de qualité à un tarif concurrentiel», confie Denis Schmitt. Parmi les clients institutionnels, on trouve notamment les Services industriels de Genève (SIG), l’EPFL et les Hôpitaux universitaires de Genève (HUG), dont les anciens luminaires en cours de remplacement sont traités ici.

Compétences reconnues

Si le but premier est l’intégration des personnes handicapées ou en rupture socioprofessionnelle, leur travail dégage quand même assez de bénéfices pour couvrir l’intégralité de leurs salaires, soit 40% du budget des EPI. Les autres 60%, soit les salaires de l’encadrement, sont subventionnés par l’Etat. L’organisation du travail est toutefois adaptée aux capacités réduites des collaborateurs, qui travaillent presque tous à temps partiel, du fait de leur handicap ou de leurs problèmes psychiques.

«Nous devons trouver un poste adapté à chacun, explique Denis Schmitt. Les collaborateurs ont une productivité quatre fois moins élevée que dans une entreprise ordinaire, mais ils sont rémunérés en fonction de leurs savoir-faire. Chaque nouvelle compétence acquise donne droit à une augmentation.»

Et leurs compétences, ils sont fiers d’en faire la démonstration, à l’instar de Paul Vienne, qui travaille depuis trois ans à Ecologistic et montre volontiers comment on démonte un ordinateur. «En tout, ça me prend une ou deux heures, un peu plus si c’est un gros ordinateur, explique-t-il. En trois ans, j’en ai vu passer, des machines! J’ai d’abord suivi un stage ici, et dès le premier jour, j’ai su que c’était ce que je devais faire.»

Le Prix cantonal du développement durable, obtenu par Ecologistic en 2012, est aussi un motif de fierté. «C’est valorisant pour les collaborateurs, se réjouit Frédéric Métral. Avant, ce genre de travail était mal considéré, mais ce n’est plus le cas.» (TDG)

La Tribune de Genève Samedi-Dimanche 27-28 Août 2016
Article : Antoine Grosjean
Photo: Steeve Iuncker Gomez

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Auteur de la page

Denis Schmitt

Chef du service des ateliers

Modérateur

Charlotte Blaise

Consultante