Startup circulaire N°2 - [Entretien Nicolas Freudiger - ID Genève] « L’économie circulaire peut être appliquée à n’importe quel secteur et a un grand potentiel »

Startup circulaire N°2 - [Entretien Nicolas Freudiger - ID Genève]  « L’économie circulaire peut être appliquée à n’importe quel secteur et a un grand potentiel »

 

Cet été, nous donnons la parole à trois jeunes entreprises. Créées en 2020, elles évoquent pour nous leur modèle d’affaires, leurs ambitions et difficultés. Elles ont en commun une campagne de crowdfunding ayant très bien performé, l’envie d’une économie différente et la volonté de montrer que le modèle circulaire peut s’adapter à tous les secteurs d’activités. Aujourd’hui, interview avec ID Genève, fabricant de montres créées à partir de matières recyclées et recyclables.

ID Genève réalise des montres à base d’acier 100% recyclé, provenant des déchets des entreprises horlogères jurassiennes. Lauréate du « Circular Economy Transition», la société a été sélectionnée parmi 27 startups visant à rendre la Suisse plus circulaire. Son concept – qui gagné le « Circular Economy Award 2020 » dans la catégorie des biens de consommation – semble plaire au public : lors de sa campagne de financement participatif, la société avait demandé CHF 150'000, le minimum pour lancer la production, et en a obtenu 275'000.-

Interview avec Nicolas Freudiger, l’un des co-fondateurs, aux côtés de Singal Moesch et Cédric Mulhauser.

-D’où vous est venue l’idée de développer ce produit ?

-Nicolas Freudiger. Des valeurs des co-fondateurs, de notre style de vie. Nous ne nous retrouvions pas dans l’horlogerie traditionnelle. Nous avons voulu innover pour proposer la montre la plus écologique, basée notamment sur la circularité et les circuits courts. Nous avons vu qu’il y avait de l’intérêt : quand nous avons lancé notre campagne de crowdfunding, nous avons récolté la somme demandée en moins de 48 heures.

-En quoi votre service / produit se différencie-t-il de ceux de vos concurrents ?

-N.F. Le nom de notre marque contient ID, pour identité, car nous voulons redéfinir l’idée d’identité dans le monde du luxe, où la perception des matériaux recyclés est négative. Nous ambitionnons donc de casser les préjugés afin de conjuguer luxe et économie circulaire.

Concrètement, nous utilisons de l’acier 100% recyclé et collecté localement, l’acier inoxydable 4441, l’un des meilleurs de l’industrie horlogère. Nous traçons son origine jusqu’au déchet. Le bracelet est fabriqué à 80% en peau de raisins séchée, puis tannée en éco-cuir. Nous upcyclons nos mouvements en utilisant des mouvements automatiques entièrement reconditionnés en Suisse. Nous refusons de faire des compromis en termes de qualité et notre bracelet en compost végétal a les mêmes qualités que le cuir. Les emballages sont produits à base de champignons. Beaucoup de fournisseurs nous ont proposé du plastique recyclé, mais nous avons une vision à plus long-terme.

-Quel est le pourcentage total de votre montre fabriqué en matière recyclée ?

-N.F. Plus de 98% du poids de la montre est fabriqué à l’aide de matériaux recyclés et recyclables. Nous travaillons en effet sur toute la durée de vie de notre produit, y compris sur sa fin. Nous estimons à 100 ans la durée de vie de nos montres. Pour encourager la circularité, nous avons lancé un service reposant sur trois piliers : d’abord, le service après-vente avec les réparations et le maintien de la montre. Ensuite, comme la montre est éco-conçue, elle peut facilement être modifiée et réparée ou évoluer. Enfin, nous avons créé un webshop de deuxième main avec possibilité de cash-back, le tout lié à une monnaie circulaire (les « Circular Coins ») : à l’achat, nos clients reçoivent un certain montant de ces Circular Coins qui vont leur permettre de bénéficier de services gratuits ou moins chers (p.ex. pour la révision du mouvement) afin de les encourager à prendre soin de leur montre.

-Quelles sont les principales difficultés rencontrées et qu’avez-vous pu mettre en place pour y remédier ?

-N.F. L’industrie horlogère est très traditionnelle. L’éco-start-up n’existe pas dans ce domaine. Nous avons dû trouver des gens prêts à faire des collaborations, à porter ce message positif et à participer à la transition écologique. Il faut influencer l’industrie pour qu’elle joue un rôle dans cette transition.

-Quels conseils donneriez-vous à d’autres entrepreneur-euse-s qui voudraient lancer une société éco-responsable ?

-N.F. Ne pas se décourager et se dire que l’économie circulaire peut être appliquée à n’importe quel secteur et qu’elle a un grand potentiel. Au niveau de l’entreprise elle-même, il faut établir un mapping de l’écosystème, discuter avec chaque partie prenante, s’assurer de la cohérence de son modèle d’affaires (pourquoi faire venir de l’acier du Japon pour fabriquer une montre suisse ?) et revenir à une certaine simplicité. D’ailleurs pour l’économie circulaire, le passé est une bonne source d’inspiration.

Pensez-vous qu’il est possible d’être rentable avec un modèle circulaire ?

N.F. Oui, clairement. Et c’est important pour nous de montrer qu’un tel modèle peut être rentable. Notre objectif est de nous payer un salaire cette année. Ensuite, nous espérons dégager une marge plus confortable afin de pouvoir être présents dans les boutiques, y compris à l’international.

Pour en savoir plus sur ID Genève, cliquez ici.

Entretien et rédaction réalisés par Aline Yazgi pour l'équipe Genie.ch (publication le 09.08.2021).

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