Zoom sur une économie circulaire florissante : La manivelle Lausanne

  • par Rédaction
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  • le 2019-11-29 12:22:27
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Primé par la Ville, un lieu de prêt d'outils et de matériel va bientôt voir le jour dans la capitale vaudoise. Des projets du genre fleurissent partout en Suisse.

Acheter moins, partager plus, donner une deuxième vie aux objets qui dorment dans la cave 360 jours par an: voilà le rêve d'une bande de Lausannois qui prend maintenant réalité. Inspirés par l'exemple de Genève, où une bibliothèque d'objets existe depuis presque un an, ils lancent La Manivelle de Lausanne, accompagnés par leurs grands frères genevois. Lauréat cet automne du concours du budget participatif de la Ville de Lausanne, le projet est soutenu financièrement à hauteur de 20'000 fr.

Le concept: sur abonnement, n'importe qui peut emprunter un marteau, un four à raclette ou une boule à facettes le temps qu'il en a besoin, plutôt qu'en acheter un neuf et de le laisser dormir dans une armoire. «Une perceuse est utilisée en moyenne 16 minutes par an et par foyer, relève Valentin Augsburger, membre fondateur. Le reste du temps, elle prend de la place que nous n'avons pas. Et acheter neuf peut coûter cher!» Outre l'aspect pratique, l'argument est aussi environnemental: faire circuler les objets est beaucoup plus écologique que produire du neuf pour chaque ménage.

Questions logistiques mais aussi philosophiques

La Manivelle Lausanne débutera le 1er décembre par une grande récolte d'objets. Petit problème: ils ne seront pas encore stockés dans le local définitif de la bibliothèque, encore inconnu à cause de quelques problèmes de dernière minute. Mais cela n'inquiète pas Valentin Augsburger. «L'heure est plutôt aux bonnes nouvelles. Beaucoup de gens se sont annoncés pour des dons et des abonnements, et on vient de conclure un partenariat avec l'EVAM pour collaborer avec un migrant.»

L'association réfléchit en outre à des questions plus philosophiques, comme le prix des abonnements, la part de bénévolat demandée, la façon de fidéliser les abonnés, le choix entre le don d'objets ou seulement la mise à disposition, etc. La Manivelle songe de plus à proposer un partage de compétences en plus du partage matériel.

Outre Lausanne et Genève, le concept existe aussi à Berne et à Sierre (VS) depuis peu. Un crowdfunding est en cours pour un projet bâlois, et des graines ont été semées à Fribourg, Sion et Martigny (VS) notamment. Par ailleurs, le site Pumpipumpe répertorie et propose de signaler les outils utiles chez chacun, pour faciliter le prêt dans le voisinage.

Déjà 1000 objets prêtés à Genève

En un an, un millier d'objets ont déjà été donnés à La Manivelle Genève, et à peu près le même nombre d'emprunts. «La star de notre caverne d'Ali Baba, c'est la perceuse, et plus généralement les outils, explique Robert Stitelmann. Mais on a aussi des objets plus insolites, comme des raquettes à neige, ou un aquarium... Qui est déjà sorti deux fois! Pour des projets artistiques notamment.»

Le nombre de membres est plus confidentiel: 160, dont une dizaines d'associations. «Ces dernières représentent plusieurs centaines de membres. C'est une porte d'entrée, car parfois les gens ont peur de s'engager et ils peuvent ainsi découvrir le concept.» Pour faciliter l'adhésion, la coopérative a maintenant un employé travaillant à 50%, ce qui permet des horaires d'ouvertures plus larges. Pour le reste, des bénévoles entretiennent, rangent, cataloguent, expliquent, cherchent des partenariats ou encore organisent des événements.

Une économie circulaire florissante

Face à l'explosion de l'utilisation de ressources naturelles, qui a triplé depuis les années 1980, il existe une tendance à diminuer la production d'objets neufs et leur destruction. «Ce n'est pas complètement nouveau. Certaines techniques, très rentables et qualitatives, sont utilisées depuis longtemps», explique Nils Moussu, membre du Mouvement pour l'économie circulaire suisse, qui cite par exemple la buanderie ou le car-sharing.

«Pour les entreprises, il est intéressant de vendre l'usage d'un objet plutôt que l'objet lui-même, poursuit-il. Du coup, elles ont intérêt à prolonger sa durée de vie. C'est aussi intéressant pour l'entreprise ou le privé qui achète cet usage, car ils peuvent viser la qualité avec un investissement moindre.» Et de citer l'entreprise Elite, à Aubonne (VD), qui loue des matelas haut de gamme à des hôtels. En outre, certaines firmes de construction comme Losinger Marazzi prévoient d'emblée de réutiliser de vieux matériaux, lors de la conception de leurs projets.

Quant à l'adhésion du public, elle est encore timide. «C'est peut-être à cause l'effort supplémentaire à fournir, tant que ces services ne sont pas à tous les coins de rue, avance Nils Moussu. Ou un attachement à la possession matérielle...» A tous niveaux, les autorités soutiennent et mutualisent en tout cas de plus en plus les projets de partage et de réparation.

Article publié par le 20 minutes et écrit par Par Pauline Rumpf

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