[Entretien avec Sébastien Kicka, OPI] VADEME : valoriser les matériaux d’excavation en terres fertiles

[Entretien avec Sébastien Kicka, OPI] VADEME : valoriser les matériaux d’excavation en terres fertiles

L’initiative VADEME – pour Valorisation des déchets minéraux des bas­sins genevois et annécien – conduite entre 2020 et 2022 a empoigné la problématique de la gestion des déchets inertes issus des grands chantiers de développement urbain. Son approche transfrontalière, à l’échelle du Grand Genève, s’inscrit dans le programme Interreg France-Suisse, qui regroupe une série de projets cofinancés par le Fonds européen de développement régional (FEDER), la Confédération suisse et les cantons pour soutenir la coopération territoriale européenne.

Sur le fond, l’objectif de VADEME est de développer des innovations par l’intermédiaire de projets collaboratifs entre partenaires publics et privés, au profit du territoire. Concrètement, il est question d’accroître la part valorisée des déchets et de favoriser l’émergence d’une économie circulaire de la gestion des déblais-remblais inertes. Une problématique qui est aussi rendue nécessaire par le manque de lieux de stockage dans la région.


Partenaires du projet

En Suisse : OPI - Office de promotion des Industries et des technologies, Etat de Genève / GESDEC – Service de géologie, sols et déchets du canton de Genève, Edaphos, Induni, Chavaz SA

En France : CAUE - Conseil d’Architecture, d'urbanisme et de l’environnement de Haute -Savoie, CASMB - Chambre d’agriculture Savoie-Mont Blanc, NEO-ECO, Cluster INDURA - Infrastructures Durables Auvergne-Rhône-Alpes


Parmi les acteurs de ce projet, l’OPI – Office de Promotion des Industries et des Technologies a tenu le rôle de chef de file côté suisse. Rencontre avec Sébastien Kicka, chargé de projet

Quel a été votre rôle dans le cadre du projet VADEME ?

De manière générale, nous avons agi en tant que facilitateur, en coordonnant les actions du consortium. Avec les bureaux NEO-ECO et Co-objectifs 21, nous avions également pour mission d’intégrer au projet une analyse fi­nancière afin de valider la pertinence économique des solutions de re-fertilisation des terres d’excavation. L’objectif étant de démontrer la faisabilité d’une boucle d’éco­nomie circulaire autour de la valorisation de ces matériaux.

En quoi les terres d’excavations sont-elles une problématique ?

Il faut savoir que sur un chantier, seule la première couche de terre – que l’on appelle horizon A – est récupérée et réutilisée, pour autant qu’elle ne soit pas polluée : on parle de 20 à 30 cm de terre fertile, qui peut être utilisée pour la culture. Plus en profondeur, les matériaux d’excavation issus des horizons B et C, moins fertiles voire stériles sont mis en décharge.

Or, les capacités de stockage - ou plutôt les sous-capacités - sont une problématique propre à tout le bassin genevois. Et en guise d’alternative, le transport de tonnes de terre représente un coût carbone que l’on peut éviter.

Dès lors, quelle solution a été privilégiée ?

L’idée est de valoriser ce matériau, c’est-à dire de reconstituer un sol fertile en partant de terres d’excavation stériles. C’est là qu’intervient l’expertise d’Edaphos, spécialiste en ingénierie des sols et en génie pédologique. Ils ont développé des process qui, en s’appuyant sur l’action de bactéries et de champignons spécifiques, accélèrent les processus naturels de création des sols et les rendent fertiles en l’espace de six mois.

C’est donc un procédé « naturel » qui a été mis en œuvre dans le cadre d’un chantier très emblématique…Avec quel résultat ?

En effet, pour le démontrer, un pilote a été réalisé in situ, sur le chantier de renaturation de l'Aire, entre Lully (Bernex), Certoux et la frontière française. Avec la collaboration du maître d’œuvre, le consortium Scrasa Induni, l’enjeu était de fertiliser des limons plutôt stériles afin de démontrer l’efficacité du procédé. Sans oublier en bout de chaine, sa viabilité économique.

Les résultats ont été très satisfaisants, tant sur la qualité des terres valorisées que sur leur commercialisation. Concrètement, 100% des terres recyclées, soit environ 3000 m3 revendus à prix coûtants, ont trouvé preneur auprès de paysagistes qui l’on jugée de bonne qualité. En d’autres termes, le projet a bel et bien permis de créer une boucle d’économie circulaire.

Le projet VADEME s’est achevé comme prévu à fin 2022. Quelle suite lui donner ?

Un bilan complet est en cours d’élaboration. Il faut d’ailleurs relever qu’un second pilote était conduit en parallèle, avec des déchets d’excavation de différentes provenances collectées à la carrière Chavaz, à Veyrier. Malheureusement, la présence fortuite de terres polluées nous a contraint à le suspendre.

Il n’en demeure pas moins que les résultats obtenus sont encourageants et ouvrent des perspectives remarquables qui pourraient engendrer une suite au projet VADEME. D’ici là, nous bénéficierons progressivement de retours d’expérience des paysagistes. Sur un autre plan, le positionnement économique des terres valorisées est central et se pose différemment de part et d’autre de la frontière, surtout en raison des prix pratiqués sur ces deux marchés. Cette dimension doit être intégrée aux futures réflexions.

 


 

Infos sous https://interreg-vademe.caue74.fr/le-projet-vademe/

Vidéos

- Contexte et objectifs du projet : https://www.youtube.com/watch?v=fHm_rjn3fak 

- Process de fertilisation des terres inertes développé par Edaphos : https://www.youtube.com/watch?v=lGIU9OiUu4Y

 

 

 

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Auteur de la page

Sébastien Bourqui

Genie.ch

Modérateur

Arthur Bonglet

Community manager