Témoignages Genie.ch #3 : Joël Tronchon (SEB)

Témoignages Genie.ch #3 : Joël Tronchon (SEB)

Entreprendre autrement : des chefs d’entreprise qui font évoluer le mot « réussite »

Depuis le 19 janvier, Genie.ch publie une série de témoignages recueillis dans le cadre du 4ème Parlement des Entrepreneurs d'avenir qui s’est tenu les 5 et 6 décembre 2015 à Paris, en marge de la COP 21. [En savoir plus]

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Témoignage Genie.ch #3

Joël Tronchon : « Je fais rêver les marketeurs !  »

Joël Tronchon est directeur Développement durable à la direction du groupe SEB, le leader mondial dans le domaine du petit équipement domestique (ustensiles ménagers, électroménager, etc.) 4 milliards de chiffre d’affaire, 25'000 collaborateurs, implantation dans 150 pays. Il initie des démarches qui innovent en s’inspirant du temps de nos grand-mères, où une casserole durait 30 ans. 


Joël Tronchon, pourquoi votre entreprise de transformation s’inscrit-elle dans une démarche d’économie circulaire?

Notre position de leader mondial du marché du petit équipement domestique nous confère des responsabilités vis-à-vis de l’écosystème, à la fois local et mondial, dans lequel nous évoluons : consommateurs, salariés, actionnaires, autorités publiques, clients, fournisseurs, communautés locales dans lesquelles nos sites sont implantés…Nous générons de la consommation, nous utilisons de la matière première, et produisons du déchet. Donc nous avons une responsabilité.

Quelles actions menez-vous ?

Tout d’abord, nous réparons. Aujourd’hui, peu d’industries le disent : nos produits sont réparables 10 ans après la vente. En 2014, 67 % de nos produits commercialisés étaient entièrement réparables, et 95 % l’étaient partiellement. Nous avons donc 36'000 références de pièces détachées en stock, aucune pièce ne coûtant plus de la moitié du prix du produit. Pour les réparations, nous nous appuyons sur un réseau de 6’500 réparateurs agréés dans le monde.

En second lieu, nous recyclons. Nous avons des partenariats avec la grande distribution : pour encourager les clients à rapporter un objet pour le recyclage, il leur faut un petit « sucre » : nous leur offrons donc un bon de 50 % de réduction sur l’achat d’un nouveau produit, qui sera le plus souvent réalisé en alu recyclé !

Enfin, nous testons une nouvelle opération-pilote, qui est la location de produits culinaires électriques. Par exemple, vous avez sans doute dans votre placard une machine à raclettes, dont vous vous servez trois fois par an quand vous avez des copains à la maison et qu’il fait froid ? Peut-être que ce ne serait pas idiot de la louer. Il suffirait d’aller la chercher dans la chaîne de distribution du quartier, avec laquelle nous avons une convention. Puis des entreprises de réinsertion s’occupent du lavage. Actuellement nous faisons un test avec 36 articles dans l’agglomération dijonnaise.

50 % de rabais…Ces opérations sont-elles rentables ?

Je vous assure qu’on ne perd pas d’argent, on en gagne ! Pour les magasins de distribution, tout cela génère du trafic, et engendre de bonnes retombées économiques. Ils aiment donc travailler avec nous et mettent nos marques en avant. Nous gagnons des parts de marché.

Comment ne vous faites-vous pas écharper par la direction Recherche et Marketing, qui perdent sur les marges des produits ?

En les faisant rêver ! C’est vrai, 80 % des marketeurs préfèrent « sortir » un nouveau produit similaire à celui qui a bien marché il y a 3 ou 4 ans, sauf qu’il est rouge ou vert, qu’il clignote ou qu’il a une nouvelle fonctionnalité. Mais 20 % au contraire ont une conscience de citoyen, ils sont contents d’inventer quelque-chose de nouveau et de durable. Je leur dis : « Passe 10% de ton temps sur un produit recyclé, et si ça marche, on aura réussi quelque-chose de bien et on ira le présenter ensemble à la direction générale !» Et cela a un fort impact sur la motivation et l’engagement individuel. En rentrant chez eux le soir, ces collaborateurs parlent bien plus de ces produits-là que des autres !

Quels sont vos rêves ?

En dehors de faire rêver les marketeurs et les financiers, je rêve de travailler dans le monde de l’économie, et en même temps de faire quelque-chose qui a du sens : comme je ne suis pas schizophrène, je rêve donc de continuer à faire exactement mon job de directeur développement durable !  Le développement durable, ce n’est pas un rêve inatteignable, c’est l’utopie modeste.

Pour en savoir plus : 

Les engagements du Groupe SEB

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Témoignages Genie.ch - Propos reccueillis par Caroline Dallèves - République et Canton de Genève
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2021
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Membre du comité d'animation GENIE.ch